Tout savoir sur le droit de la santé
Le droit médical permet d’attaquer en justice votre médecin ou votre chirurgien. Les explications de Me François-Xavier Awatar. ©Freepik

Erreur de diagnostic, opération chirurgicale ratée, séquelles… La notion de droit médical permet d’attaquer en justice la responsabilité civile et pénale des professionnels de santé. Cette action vise à assurer les droits des patients. Me François-Xavier Awatar, avocat en droit de la santé, est venu témoigner sur le plateau de BFM Lyon dans Votre Santé.

Votre opération de chirurgie esthétique est ratée ?  Vous avez le sentiment que votre suivi médical n’a pas été bien fait ? Le secret professionnel n’a pas été respecté ? Faut-il attaquer en justice votre médecin ou votre chirurgien ? Comment obtenir gain de cause ?

Maître François-Xavier Awatar, avocat en droit de la santé, a répondu à toutes ces questions dans l’émission Votre Santé sur BFM Lyon, ce jeudi 20 mai. Un rendez-vous hebdomadaire animé par Octavie Couchard et Pascal Auclair, rédacteur en chef du groupe Ma Santé.

 

Quels sont les avocats spécialisés en droit de la santé ?

Il y a différents types d’avocat dans le droit de la santé. Une partie va traiter les contentieux du côté des patients, les personnes qui s’estiment victimes d’une erreur médicaled. D’autres vont traiter les contentieux pour les praticiens (cliniciens, médecins,…) dans le but de les défendre face aux erreurs médicales.

 

Victime d’une erreur médicale, comment agir ?

Quels sont les principaux contentieux que les avocats de la santé sont amenés à traiter ?

Le contentieux est très facile à comprendre, il suit la vie du patient. En effet, il y a des contentieux dans le diagnostic. Est-ce que le diagnostic a été bien fait ? Il y a aussi des contentieux dans la technique médicale. Pour un chirurgien, est-ce que l’opération a été bien réalisée? Il y a aussi des contentieux liés au secret médical. Est-ce qu’on a violé ou non le secret médical ? De sucroît, il a des contentieux liés à l’information du patient. Est-ce qu’il a été bien informé des conséquences d’une opération ? Et enfin le suivi médical, a-t-il été bien fait ?

 

Est-ce qu’il y a des domaines qui suscitent davantage de contentieux ? 

Naturellement, il s’agit de la chirurgie. Le domaine principal est la neurochirurgie, puis la chirurgie orthopédique, la chirurgie plastique et ensuite d’autres professions viennent s’ajouter comme la gynécologie et la radiologie.

 

Quelles sont les étapes à réaliser pour obtenir gain de cause si j’ai le sentiment d’avoir subi une mauvaise opération ?

Il y a plusieurs démarches. Une première démarche très peu coûteuse puisqu’elle ne nécessite pas d’avoir recours à un avocat. Il s’agit de déposer un dossier à la CRCI (Commission Régionale de Conciliation et Indemnisation des Accidents Médicaux). Ce dossier va être étudié par des experts n’entraînant aucun coût pour le plaignant. On va avoir recours à la CRCI pour des dossiers à faibles enjeux. Puis, il va y avoir la saisie d’un tribunal judiciaire pour faire valoir ses droits. Donc, une potentielle erreur médicale qui donnera droit à une indémnisation. Il y a aura nécessairement une expertise judiciaire qui déterminera ou non, la faute.

 

Qu’est-ce que je peux espérer obtenir comme indemnités ?

Tout savoir sur le droit médical
Me François-Xavier Awatar (avocat de la santé) répond aux questions de Pascal Auclair (Votre Santé). ©BFM LYON

Il y a plusieurs types de préjudices : une balafre, une paralysie d’un bras, des préjudices sexuels… En termes d’indemnisation, sur environ 800 demandes qui ont eu gain de cause en 2020, plus de la moitié des personnes ont eu des indemnités de moins de 100 000 euros. Ensuite, une cinquantaine entre 100 000 et 500 000 euros. Une autre cinquantaine à plus de 500 000 et environ huit à 1 million d’euros ou plus.

 

Les plus grosses indemnités concernent quels préjudices ?

Elles concernent généralement des enfants en bas âge. Par exemple, pour un nourrisson d’une quinzaine de jours, il y a eu une erreur de diagnostic sur une infection urinaire. Cette infection a entraîné de très grosses séquelles neurologiques. Le bébé va être totalement paralysé toute sa vie. Il a donc obtenu une grosse indemnité de plus de 3 millions d’euros.

 

Quel est le pourcentage des actions en justice qui aboutissent à une indemnité ?

Sur les déclarations de sinistres qui sont faites, seulement 1% amène à une indemnité. En revanche, à propos des succès des actions, c’est passé de une sur trois il y a 20 ans, à deux sur trois aujourd’hui.

 

Ce sont des procédures longues ?

Oui, très longues. En moyenne, si on saisit un tribunal, c’est au moins 4 ans de procédure. Dans mon cabinet, nous avons des dossiers sur 2 ans et d’autres sur 10 ans.

 

Quelle est la difficulté majeure pour expliquer des procédures si longues ?

La difficulté, c’est de prouver qu’il y a eu erreur médicale, et quel type d’erreur médicale ? Et également de prouver que de cette erreur résulte un préjudice. De fait, il y a plein d’erreurs médicales sans entraîner de préjudice derrière.

 

Une judiciarisation de la santé en augmentation en France

Américanisation : les patients attaquent-ils au moindre problème ?  

C’est tout à fait vrai, une américanisation est en cours en France. Cela dit, il y a trois fois plus d’actions en France qu’aux Etats-Unis. En revanche, aux Etats-Unis, les indemnités sont bien plus importante qu’en France, de manière exponentielle.

 

Les nouvelles technologies contribuent-elles à cette judiciarisation ?

Oui, cela va les multiplier. Beaucoup de contentieux vont arriver. Par exemple, la violation des données personnelles qu’entraîne les cartes vitales.

 

Droit de la santé et crise sanitaire 

Est-ce que la crise sanitaire a engendré plus d’affaires ? 

Pour l’instant, nous n’avons pas le recul. En revanche, il est évident qu’à travers les télésoins, il y a moins de dialogues, moins de confiance. Donc, on anticipe des contentieux beaucoup plus fréquents. Mais contentieux ne veut pas dire succès et obtention d’indemnités !

 

Regardez en replay l’interview de Maître François-Xavier Awatar sur le droit médical en France

 

À SAVOIR

LA CNIL (Commission nationale de l’informatique et des libertés) a enregistré en 2020 une hausse fulgurante de 24% des violations de données. Cette commission note que les établissements de santé sont une cible de plus en plus courante. De fait, une hausse de 83% a été enregistrée concernant les violations de données dans le milieu de la santé. Dernièrement, un ransomware (un logiciel qui prend en otage des données personnelles en demandant une rançon pour les libérer) avait envahi les postes informatiques du centre hospitalier de Villefranche-sur-Saône.

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